SECTEUR ECONOMIQUE EXPOSE ET PROTEGE : UNE REALITE ARTIFICIELLE ?
Ces dernières années, les médias ont largement commenté le repli de l’industrie française.
Délocalisation, coût du travail, manque de compétitivité, érosion de l’emploi industriel, etc., ont défrayé la chronique dans les rubriques économiques des différents journaux, ou autres espaces consacré à l’infirmation du grand public.
Ainsi, devient-il quasiment impossible d’ignorer que la France a vu ses parts de marché à l’international tomber de 4,7 % en 2000 à 3 % en 2014, tandis que note voisin Allemand les maintenait à 8,5 %.
Autre indicateur tout aussi tranchant, la part de l’industrie dans le PIB est passé de 16,6 % en 2000 à 12,4 % en 2014.
Aussi, est-il coutume d’entendre ou de lire que le secteur industriel se trouve être exposé à la concurrence internationale.
Par opposition, nous entendons également qu’il existerait un secteur préservé de ladite concurrence.
D’un côté, l’automobile, la chimie, la métallurgie répondraient à des contraintes de compétitivité par les coûts, l’innovation, les gains de productivité. De l’autre côté, les services à la personne, le BTP, les services administrés seraient plutôt épargnés par les contraintes de la concurrence internationale.
Pour autant, est-ce vraiment le cas ? Car derrière cette dualité économique toute faite, se cachent des orientations de politiques publiques qui vont modeler plus ou moins subtilement le futur des territoires et leur attractivité globale.
L’économie est bien plus intégrée que l’on pense. A l’image du corps humain, si le cœur bat, les autres organes fonctionnent. Autant dire que les secteurs dits « concurrentiels » impactent la vitalité des secteurs appelés « protégés ».
Dans les faits, le secteur « exposé » a besoin, pour produire et exporter, des biens et services réalisés par le secteur « protégé ».
Les réseaux ferrés, autoroutiers, les services publics, la formation, etc., sont autant de biens ou services consommés par le secteur « exposé ». Plus ces biens ou services sont fournis avec célérité et efficacité, plus notre secteur exposé est compétitif.
Dans le même temps, plus les coûts offerts par les secteurs « protégé » sont faibles, plus le coût du travail dans le secteur exposé l’est aussi, à niveau de vie équivalent.
A titre d’exemple, un étude du Crédit Foncier en 2015 montre que le prix de m2 en France est de 3 900 €, alors qu’en Allemagne il est de 1 850 € pour une population plus élevée et une superficie moins importante, ce qui théoriquement devrait appeler à une situation inverse.
Ces coûts de logements impactent les coûts salariaux et, par conséquent, la capacité du secteur exposé à être compétitif à l’échelle internationale. Sans compter que les coûts issus du logement obèrent les capacités d’investissement et de consommation des ménages.
Ne nous trompons pas. Le raisonnement dualiste entre secteur « exposé » et « protégé » ne permet pas de comprendre les imbrications sectorielles qui composent en réalité une chaine de valeur plus complexe et plus transversale.
Le monde tel que nous le connaissons et vivons fait fi des frontières artificielles pour tendre vers des relations de fonctionnalité inclusives fortes créant du mouvement, des flux au service d’ensembles uniques : les territoires.
Dès lors, il est impératif que les différentes stratégies des acteurs économiques des territoires prennent en compte les objectifs de performance économique de leur espace.
Par exemple, pour les documents stratégiques (documents d’urbanisme : SCoT, PLUi ; autres schémas : schéma d’accueil d’entreprises, stratégies foncières, etc……), il est nécessaire que les territoires interprètent leur tissu économique local comme une chaine de valeur faite de complémentarités sectorielles.
L’environnement, l’habitat, les équipements, les infrastructures sont autant de vecteurs de développement et de croissance pour les entreprises du secteur « exposé ». Et par translation, la bonne santé de ce dernier accroit la demande potentielle exprimée envers le secteur « protégé ».
Cette réalité donne du relief à la notion de stratégie territoriale, au service d’un véritable projet collectif.
C’est pourquoi sa détermination passe par une nouvelle compréhension des besoins convergents, à la fois des entreprises et des salariés, autorisant la mise en place d’un écosystème symbiotique régénérant les atouts des territoires.